La réserve héréditaire n’est pas un droit fondamental
Publié le :
19/04/2024
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Arrêt « Jarre », CEDH, 15 février 2024
Pour la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la soumission de la succession à une loi étrangère qui ne connait pas la réserve héréditaire n’est pas contraire aux droits fondamentaux européens.
Les faits
Monsieur Jarre s’installe aux Etats-Unis, en Californie, avec son épouse. Il transfère la totalité de ses biens (biens immobiliers situés aux États-Unis et redevances et droits d’auteurs perçus et détenus par la SACEM en France) à un trust familial commun avec son épouse.Il décède le 29 mars 2008 en Californie. En raison du trust familial, les opérations successorales sont menées aux Etats-Unis selon la loi californienne. Aucune succession n’est ouverte en France puisque le droit international privé prévoyait que la succession mobilière était soumise à la loi du pays de dernier domicile du défunt (en l’espèce, les États-Unis) et que la succession immobilière était soumise à la loi du pays dans lequel se situait l’immeuble (ici, les États-Unis, aucun bien immobilier n’étant situé en France).
La bataille judiciaire en France
Les enfants de Monsieur Jarre se retrouvent privés d’héritage alors même que la loi française (article 912 du Code civil) prévoit l’existence d’une réserve héréditaire assurant une part successorale aux descendants.
Ils saisissent les tribunaux français pour contester la succession s’étant déroulée aux Etats-Unis. Ils sont cependant déboutés de leur demande.
Ils forment un pourvoi en cassation, estimant que la loi californienne qui ignore la réserve héréditaire est contraire à l’ordre public international français.
En 2017 la Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle considère que la réserve héréditaire n’est pas, en soi, un élément de l’ordre public international français. Ainsi, les descendants n’étant pas en état de précarité économique, la loi française n’a pas à s’imposer à la loi californienne.
Les enfants de Monsieur Jarre saisissent la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
La solution de la CEDH
Dans son arrêt rendu le 15 février 2024, la Cour européenne donne raison aux juridictions françaises, considérant qu’il n’existe pas, en droit européen, de droit général et inconditionnel des enfants à hériter d’une partie des biens de leurs parents. La Cour considère que la Cour de cassation n’a fait que respecter la liberté testamentaire du défunt après s’être justement assurée que ses descendants n’étaient pas en état de précarité économique.
Historique
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